Conférence — lecture

Valery Larbaud s’est laissé enlever par le souffle qui fait claquer les voiles et se lever les images, les horizons, les phrases. Après Chateaubriand, Lamartine, Nerval, Flaubert, Loti et bien d’autres, il explora la Méditerranée, la tête grisée de toute la poésie antique. Il se passionna aussi pour la langue anglaise, ce qui lui permit de cosigner avec Joyce en personne la version française d’Ulysses. Les mondes inconnus ne lui faisaient pas peur : ne choisit-il pas pour pseudonyme Barnabooth, un nom qu’on dirait forgé par Lovecraft, ou bien L. Hagiosy, ou encore X. M. Tourmier de Zamble ? Amoureux des paquebots, de l’Orient-Express et des automobiles qui ressemblent à ces bêtes lyriques qu’il entendait rire en son sein, Larbaud pratiquait ce dandysme dont un Paul Morand, à sa suite, fut le champion. Il cultiva quelques songeries politiques, parmi lesquelles ce grand rêve des États-Unis d’Europe dont l’Occitanie, qu’il appelait Septimanie, eût été l’une des composantes, avec Montpellier
pour phare.

Montpellier, « l’une des petites capitales secrètes de la France », Larbaud y passait volontiers ses hivers, moitié pour le climat, moitié pour l’Université́ qui lui permettait de se livrer à Ce vice impuni, la lecture, pour reprendre le titre de l’un de ses livres. Montpellier figurait la pointe d’un triangle dont une ville italienne et une ville espagnole auraient été les autres sommets : « J’ai des souvenirs de villes comme on a des souvenirs d’amour. » S’il logeait à l’hôtel de la Métropole, sa préférence allait au Jardin des Plantes. « Le moment le plus agréable dans l’allée Cusson : de dix heures du matin à midi, écrit-il dans Jaune bleu blanc. C’est un admirable lieu de lecture, cette allée surélevée au cœur du Jardin des Plantes, entre deux murs de verdures variées : yeuses, pins, ginkgos bilobas, bambous épais, arbres de Judée, que dépassent les cimes d’autres pins et des micocouliers géants. » De l’esplanade, il aimait voir « les deux rangées de platanes de la route de Nîmes, dénudées, hautes, d’un brun rougeâtre sur l’horizon blanc ».
Amoureux des latitudes, épris des longitudes, Valery Larbaud ne mourut pas à Potosí ou à Zanzibar mais à Vichy, en 1957, où il était né en 1881. Ce fut en réalité  une seconde mort : la paralysie le clouait depuis vingt ans dans un fauteuil. S’était-il alors convaincu des vertus du voyage  intérieur, lui qui est aussi l’auteur de ce « livre de voyage à l’arrêt »,

ENVIE D’ALLER PLUS LOIN … MÉDIATHÈQUE CENTRALE ÉMILE ZOLA
DU 4 JUIN AU 31 AOÛT 2024
Habituellement conservées à l’abri des regards dans les réserves patrimoniales de la médiathèque, quelques belles éditions de Valery Larbaud sont de sortie en l’honneur du Festival Radio France.
À travers ces œuvres rares à découvrir dans la vitrine du hall central de la médiathèque Émile Zola, c’est la ville de Montpellier et sa région qui sont célébrées.
Retrouvez également une sélection de disques, de livres et de films à emprunter à la médiathèque en lien avec la programmation du Festival.
Plus d’informations sur www.mediathequesmontpellier3m.fr